Emmanuel Macron n’est pas officiellement candidat à sa réélection. Ses déplacements en Creuse et en Haute-Vienne n’auraient donc pas de visées électoralistes, mais s’inscriraient simplement « dans la continuité des déplacements ruraux » de son quinquennat, a précisé l’Élysée. Un quinquennat qui aurait fait de « la réduction des inégalités territoriales » l’une de ses priorités.

Pour répondre au sentiment d'abandon des zones rurales, notamment mis en exergue par la crise des gilets jaunes, le gouvernement avait établi en 2019, un agenda rural, censé répondre à diverses problématiques. Celui-ci ne compte pas moins de 181 mesures, de la désertification médicale, au soutien des petits commerçants en passant par la résorption des zones blanches de téléphonie mobile. Selon un communiqué de presse publié sur le site du ministère de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, « 93,5 % des mesures de relance des territoires ont été réalisées ou sont en cours de l'être ». Un taux de réussite et d’achèvement à relativiser, largement, selon l’association des maires ruraux de France. « C’est beaucoup de communication, alors qu’il y a encore énormément de trous dans la raquette, surtout d’un point de vue global », explique Cédric Szabo, directeur de l’association des maires ruraux de France. Tour d’horizon des propositions phares... et du résultat.

Déserts médicaux : « Le manque de médecins est toujours criant »

Ce lundi 24 janvier, le Président s’est rendu dans une maison de santé pluridisciplinaire dans la Creuse, accompagné de son ministre de la Santé Olivier Véran. Un outil, selon lui, nécessaire dans la lutte contre les déserts médicaux en zone rurale. « On a développé avec les collectivités des maisons de santé. Nous sommes en train de les doubler », affirmait-il le 8 décembre dernier. Si l’on regarde les chiffres, nous sommes passés de 1 322 maisons et centres de santé en 2017 a environ 2 400 aujourd’hui. « Mais le nombre de maisons de santé est décorrélé de l’évolution du nombre de médecins, analyse Cédric Szabo, directeur de l’association des maires ruraux de France. Il ne faut pas se faire avoir par les illusions du bâti, car le manque de médecins est toujours criant et parfois on a la maison de santé, sans professionnel ».

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Depuis 2010, les très nombreux soignants formés dans les années 1970 et 1980 partent à la retraite, des départs qui ne sont pas compensés. Entre 2012 et 2021, le nombre de médecins généralistes par habitant a baissé de 7 % en France. Pour y remédier, les pouvoirs publics ont aussi supprimé le plafonnement du nombre d'admis en étude de médecine, le fameux numerus clausus. La tendance à la baisse ne sera pas endiguée avant 2030, date à partir de laquelle le nombre de médecins commencera à augmenter, selon la Drees.

D’autres mesures devaient contribuer à cette politique de lutte contre les déserts médicaux, dont le déploiement des stages d’internes en médecine dans les zones rurales sous denses. « Mais ça ne se fait pas... », observe le directeur des maires ruraux, faute de caractère d’obligation.

Les maisons de services publics, « une proximité relative »

« Je veux qu’on mette en place cette maison qui s’appellerait "France services", où, dans chaque canton, on pourrait avoir un lieu où serait regroupé l’accueil pour le public de services de l’État. » C’est par ces mots qu’Emmanuel Macron répondait, en avril 2019, aux critiques sur le recul des services de l’État dans les campagnes. Résultat, trois ans après ? Le gouvernement se targue d’avoir mis au jour près de 2000 maisons de services publics, nommées « France services », à moins de 30 minutes de chaque foyer. Un guichet unique, en somme, où l’usager est censé pouvoir trouver des réponses en matière d’impôts, d’emploi, de chômage, de retraite, d’allocations familiales, d’aides au logement, de mutuelle, de courrier, de justice, de papiers d’identité…

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Dans les faits, il en existait déjà 1676, auparavant appelées « Maisons de services au public (MSAP) ». Seuls 400 ont été créés par les gouvernements de l'ère Macron. « C’est mieux parce qu’il y en a plus qu’avant souligne Cédric Szabo, toutefois pas avare de critiques, notamment sur la question financière de ces maisons. L’État raconte qu’il est parti et qu’il souhaite revenir dans ces territoires. C’est une belle histoire, mais il le fait à ses conditions et bien souvent (dans huit cas sur dix) au frais des collectivités territoriales ».

Un modèle qui agace et exaspère au sein de l’association des maires ruraux de France. Car la charge de la viabilité du projet retombe une fois de plus sur les élus locaux. Selon le gouvernement 2 500 maisons France services devraient être ouvertes avant la fin du quinquennat (soit 500 de plus qu'actuellement). « C'est un outil de proximité relative », met en garde Cédric Szabo, qui rappelle qu’il existe 32 000 communes rurales en France... Dans les faits, Marianne avait déjà documenté les déceptions engendrées par ces structures sur le terrain.

Fracture numérique : « Loin de l’objectif, mais d’énormes progrès »

En cinq ans, Emmanuel Macron s’était donné l’objectif de résorber les zones blanches de téléphonie mobile et de déployer la 4G partout où cela était possible. « 1 227 nouveaux pylônes » ont été mis en service, selon le ministère de la Cohésion des territoires, depuis le « new deal mobile ». Un accord signé en 2018 entre le gouvernement, l'Autorité de régulation des télécoms (Arcep) et les opérateurs de téléphonie mobile.Résultat : d’après l'Arcep, 80 % des infrastructures du réseau mobile ont basculé en 4G, dès la fin 2020, dans les zones qui n'y avaient pas accès trois ans plus tôt. « C’est le sujet où la progression a été la plus importante, commente le directeur des maires ruraux de France. L’objectif de la résorption des zones blanches est loin d’être réglé, mais d'énormes progrès ont été faits. ».

Plan de soutien aux petits commerces : « Les centres commerciaux attirent toujours »

Parmi les 181 propositions de l’agenda rural, figurait un plan de soutien aux petits commerces en zones rurales (cafés, bars, supérettes…). D’après le dossier presse de l’époque (2019), l’objectif affiché était de « créer des zones de revitalisation commerciale dans les communes de moins de 3 500 habitants qui ouvrent droit, si les collectivités concernées le souhaitent, à des exonérations fiscales pour les petits commerces, exonérations compensées par l’État à hauteur de 33 % ». Malgré cet outil d’incitation fiscale, « les rideaux des commerces ruraux ont du mal à rester ouverts, assure amer Cédric Szabo. Car les centres commerciaux continuent d’attirer ».

Mobilité : quelques ratés pour les trains de nuit

Sur la mobilité, Emmanuel Macron avait deux prétentions : désenclaver les territoires, à l’aide des petites lignes, des trains de fret et des trains de nuit, pour « développer des moyens de transport plus écologiques ». À sa prise de fonction, seuls deux trains de nuit fonctionnaient ou plutôt subsistaient (Paris à Rodez, ainsi que celle de Paris à Briançon). Depuis, deux ont été remis en route, dont la ligne Paris-Nice, testée et rouverte par Jean Castex en mai dernier, et la ligne Paris-Lourdes, remise en service à la mi-décembre. Emmanuel Macron s'était engagé à « améliorer ces deux lignes et à en créer deux supplémentaires » avant la fin du quinquennat. Mais d’après nos confrères de France 3, la ligne Lourdes-Paris a connu quelques ratés, à commencer par le fait que le train s’arrête finalement à Toulouse… au lieu de Lourdes.

« Avec les régions, nous avons repris en main le réseau de petites lignes : plus de 7 000 kilomètres seront ainsi préservés ou régénérés. 1 500 kilomètres l’ont déjà été entre 2017 et 2022 » a-t-il assuré en visite dans le Limousin ce lundi 25 janvier. « On réinvestit sur les axes routiers et ferroviaires de proximité » a promis Emmanuel Macron. Il n’empêche que pour pallier le vide laissé sur certaines lignes de fret et de voyageurs, une coopérative de citoyens s’active depuis la fin 2019.

« Des agriculteurs payés au prix juste » : vraiment ?

Lundi 25 janvier, le chef de l’État a commencé sa visite au lycée agricole d’Ahun, accompagné du ministre de l’Agriculture et de l’Alimentation, Julien Denormandie. Depuis sa candidature à l’élection présidentielle de 2017, Emmanuel Macron martèle qu’il faut mieux rémunérer les agriculteurs, ou plutôt faire en sorte qu’ils soient « payés au prix juste ». Mais la loi Egalim 1 a été un échec : « Les grandes surfaces et les intermédiaires continuent de pratiquer des prix nettement en dessous des coûts de production » témoignait dans nos colonnes Gilbert Julian, le président du réseau d’associations Solidarité Paysans, qui accompagne les agriculteurs précaires.

Face aux lycéens, le Président a donc rappelé l’importance de la loi Égalim 2, censée apporter des solutions pour une rémunération plus équitable des agriculteurs, notamment pour leur production de matière première. Et le ministre de l’Agriculture d’ajouter : « On se bat tous les jours pour que votre rémunération soit meilleure demain. On sera toujours à vos côtés. » Mauvais timing, alors que la polémique lancée par la baguette Leclerc à 29 centimes d'euros illustre en même temps la bataille sur le pouvoir d'achat et la difficulté des négociations entre agriculteurs et grands distributeurs.

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